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La Pensée aux absents

André DEVAMBEZ (Paris, 1867 - 1944)
1927
Huile sur toile (au centre) et huile sur carton (à gauche et à droite)
H. 130 cm ; l. 110 cm et H. 47 cm ; L. 53 cm
Inv. BA 149, BA 400, BA 401
Saint-Quentin
La Pensée aux absents
© Gérard Dufrère © Musée Antoine Lécuyer, Saint-Quentin

Engagé volontaire durant la Première guerre mondiale, André Devambez gagna le front dès décembre 1914. Inscrit le 6 février 1915 dans la section des peintres de camouflage du 1er régiment du Génie, il fut grièvement blessé le 3 juin et resta impotent pendant près de dix ans. Quant il se remit à peindre, il fut condamné aux tableaux de petites dimensions. Son premier grand tableau, quant il eut retrouvé ses forces, fut cet émouvant triptyque où se lisent les cruautés de la guerre, exprimées avec une noblesse poignante.

Le triptyque (du grec triptuklos, replié en trois, triple) désigne une œuvre formée de trois panneaux, dont deux latéraux, montés sur charnières permettant de les refermer pour couvrir la partie centrale. D'abord de petites dimensions, il se développa à partir de la fin du XIVe siècle pour orner les retables des églises. Son soubassement est généralement pourvu d'une prédelle, compartiment dont l'iconographie est en relation avec le sujet principal du tableau d' autel. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, le triptyque connut un formidable succès auprès des artistes de tous courants pour sa faculté d'anoblir et de sacraliser la peinture religieuse mais aussi laïque.

Le triptyque de Saint-Quentin est la seconde version, réduite, de l'œuvre originale présentée à Paris en 1924 et aujourd'hui conservée au Musée des beaux-arts de Tourcoing. Sur le panneau central (Le Souvenir

), l'artiste représente trois femmes de générations différentes, en tenue de deuil. Il peint au centre sa mère, à droite sa femme et à gauche sa fille, toutes trois vêtues de noir, assises sur un banc de pierre, dos au mur d'une chapelle funéraire ornée d'une couronne mortuaire. Volontairement dépouillée, la composition privilégie la psychologie qui se dégage du tableau. La nature de la douleur des trois femmes, pourtant dans une position identique, les distingue : anéantissement, incompréhension, résignation de la vieille mère, douleur intense de l'épouse, recueillement et prière de la jeune fille. Constituant la prédelle, une sorte de tombe laisse voir par une ouverture un défilé de soldats dans un cimetière militaire. Les panneaux latéraux évoquent l'isolement et la solitude des « poilus ». A gauche (La Lettre), un soldat français lit une lettre, qui le rattache à l'être aimé. A droite (Les Trous d'obus), des soldats morts, au repos ou combattants se fondent avec les mottes de terre dépourvus de toute végétation.
Une fois la Grande Guerre terminée, André Devambez concrétisa ainsi son projet : témoigner de la détresse psychologique du soldat tout autant que des civils restés à l'arrière, de la séparation, de l'isolement et de la solitude, sentiments qu'il avait dû lui-même éprouver. Il imagina un triptyque qui allait conférer à son œuvre un caractère presque sacré et lui donner le statut d'autel du souvenir.

D'après les textes fournis par la conservation
Avec le concours du service éducatif du chemin des Dames et de la caverne du Dragon

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