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Plan reliquaire de Soissons

Anonyme
Vers 1600
Cuivre fondu, ciselé, argenté et doré
H. 28 cm ; L. 71,5 cm ; l. 44 cm
Inv. d.2005.0.5 (Dépôt de l’Etat)
Provenance : trésor de la cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais
Soissons
Objet d’orfèvrerie en cuivre, représentation d’une ville en relief
© Michel Minetto © Musée de Soissons

Cet étonnant objet d'orfèvrerie constitue un document unique pour notre connaissance du Soissons médiéval : huit édifices sont en effet représentés à l'intérieur d'une enceinte. En plus d'être un reliquaire multiple, c'est aussi un des premiers exemples de représentation d'une ville en relief. Le plan reliquaire a une forme exceptionnelle. Il a sans doute été commandé pour abriter les restes des saints dont les reliquaires avaient été détruits lors du passage des Huguenots entre 1567 et 1568. Le chanoine Cabaret a réalisé un inventaire du trésor de la cathédrale en 1770 et indiquait la présence d'un « reliquaire de cuivre doré, représentant la ville de Soissons, qui renfermait beaucoup de reliques ». L'archiprêtre de Château-Thierry, lors d'un inventaire réalisé en 1805, nous donne des informations sur les reliques : « Chaque église avait son clocher et dans chaque clocher il y avait des reliques. Il contenait des ossements de saint Pierre, saint Gervais et saint Protais, saint Gaudin, saint Denis, saint Loup, des cheveux de sainte Anne, de saints martyrs et de saint Martin ». Traditionnellement on considère que l'inscription « Renavia », figurant sur le socle de la statuette disparue de la Vierge à l'Enfant, correspond à la signature de l'auteur. L'œuvre est réalisée vers 1600, après le saccage des Huguenots (1567-1568).

On peut la dater grâce à l'église Saint-Léger qui est représentée avec sa base nef érigée après 1596, la nef précédente ayant été détruite lors du passage des calvinistes. Le socle est en bois, l'aire de la ville en cuivre doré, les fortifications et les édifices sont en feuille du même métal, découpé et ciselé, les contreforts des églises et les appliques sur l'enceinte sont en cuivre fondu.

Le plan reliquaire est sur un socle en bois qui simule l' escarpe urbaine à l'ouest de l'Aisne peu de temps après l'agrandissement de l'enceinte, vers le sud, en 1550. Le quartier Saint-Vaast a été négligé. Le sol de la ville ancienne (sur la gauche) est représenté pavé, et celui de l'agrandissement de la ville (sur la droite) montre des terrains nus « boursouflés », qui figure la colline Saint-Jean. Toute la muraille crénelée de la cité est représentée; on retrouve les quatre tours d'angle : celle de la pointe de l'île, la Tour Lardier ou du Diable, la tour Macé et celle de l'Evangile. Les portes de la ville sont surmontées de châtelets : porte Saint-André, porte Saint-Christophe, porte Bara et porte du Pont, près de cette dernière se trouve la grande poterne avec son châtelet. Seules les portes Saint-Christophe et du Pont ont une toiture. Les tours Macé et de l'Evangile sont augmentées de tourelles de guet. A l'intérieur de la ville, on constate que les monuments sont à leur emplacement approximatif et dans leur orientation. Le plan reliquaire présente huit monuments, seulement trois nous sont restés. Les huit édifices sont la cathédrale, les abbayes Saint-Jean-des-Vignes, Saint-Léger, Notre-Dame, le couvent des Cordeliers, et les trois églises paroissiales Notre-Dame-des-Vignes, Saint-Quentin et Saint-Martin. Tous les édifices religieux de l'époque ne sont pas représentés. Ils sont assez proches de la réalité sauf la cathédrale qui a été dotée de deux tours. Pour combler les vides des murs de l'enceinte, l'artiste a ajouté des pilastres à arabesques et des colonnes-candélabres. Il y avait une statue d'une Vierge à l'Enfant qui se dressait au nord de la cathédrale (disparue dans les années 1960). La présence exclusive des édifices religieux, et « peuplé de saints » (avec les nombreuses reliques) fait ici de Soissons une « cité de Dieu », placée sous la protection de la Vierge Mère dont la statuette dominait l'ensemble.

Bibliographie :
Catalogue, les bâtisseurs des cathédrales gothiques, musées de la ville de Strasbourg, 1989, p.430.

Dominique Roussel
Conservateur du Patrimoine
Avec le concours du service éducatif du musée de Soissons

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